La Trace de Richard Collasse – 航跡

« Richard Collasse est né en 1953. Il est le PDG de Chanel K.K. au Japon, où il vit depuis plus de trente ans. La Trace, d’abord publié au Japon en novembre 2006, où il a fait sensation, est son premier roman. »

La Trace, titre français du roman se nomme 航跡 au Japon.  Si on s’amuse à traduire le titre japonais en français on obtient le mot « Sillage ». Le sillage, celui qui se créé par nos actions et nos choix en sillonnant la vie tel un bateau fendant la mer pour avancer.

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Le roman est avant tout la réflexion d’un homme d’âge mûr. La question est simple : la vie peut-elle nous envahir et prendre le dessus sur ce que nous sommes réellement ? Le train-train quotidien, l’accomplissement d’un chemin tout tracé peuvent finir par combler l’âme fougueuse de la jeunesse ?

Richard Collasse a écrit un roman qui fleure bon le Japon. Combien de sourires ai-je esquissés devant les péripéties de ses premiers contacts avec la planète Japon, me retrouvant quelquefois moi-même ? C’est naturel, vrai, authentique et ça tombe souvent très juste. Nous avons à faire ici à un roman écrit par un homme qui aime le Japon. Mais pas cet amour égoïste trop souvent répandu. Il y a ici quelque chose de solide qui relie l’homme à ses expériences passées sur cette terre face à ses autochtones. On sent qu’il s’est plongé dans le bain et a exploré tout le bassin.

Contrairement à Amélie Nothomb, Richard Collasse est un vrai connaisseur du Japon. Contrairement à Nothomb, il ne transmet pas non plus, entre les lignes, une pseudo supériorité arrogante de l’homme blanc envers les Japonais. Une arrogance dont j’ai maintes fois été témoin. L’Occidental juge souvent les choses selon ses propres règles. Normal qu’en participant à un jeu dont il est lui même l’arbitre, il s’en sorte mieux que les autres. Beaucoup n’ont pas compris qu’au Japon, les règles du jeu sont bien différentes et que face à celles-ci, l’Occidental sort presque toujours perdant.

On sent bien que Richard Collase cherche un peu à pointer du doigt certains problèmes de la société japonaise. Mais, il ne le fait pas de manière simplement critique. Il cherche avant tout à ce que les Japonais réalisent eux-mêmes certaines choses. Et pour ça, il leur parle à eux. Ce roman a été édité au Japon avant de sortir en France. C’est avant tout aux Japonais qu’il s’adresse. Il leur permet, le temps d’un livre, de se plonger dans le coeur d’un Occidental et de comprendre.

J’aime la démarche, car critiquer certains points du Japon dans un livre ou sur le Net en s’adressant aux Français ne sert à rien. C’est de l’ordre du loisir ou, encore une fois, une manière de se rassurer sur sa propre supériorité. Si l’on désire un minimum contribuer à améliorer les choses, je pense qu’il faut s’adresser aux principaux acteurs des éventuels points en question.

Il ne sert à rien d’en écrire trop sur ce roman. Je vous invite juste à le lire. La légèreté du début laisse place peu à peu à des notes plus dramatiques. Mais tout est bien mené et structuré. Le récit bascule entre deux époques qui se font face. La jeunesse et la maturité, l’espoir envers l’avenir et la satisfaction des années accomplies qui ont rendu aveugle un homme. Sa vie s’est quelquefois jouée à un fil. Un instant, aussi bref soit-il, peut changer à jamais le cours des choses. Ici, tout se joue en quelques secondes, le temps permettant de faire glisser un shoji.

À travers les forêts

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On parle souvent du Japon comme d’un pays hyper industrialisé dont l’urbanisme semble envahir toutes ses terres. Mais en réalité, avec plus de 60% du territoire recouvert de forêts, on remarque qu’il serait maladroit de voir dans ce pays uniquement ses impressionnantes villes et ses infrastructures.

Avec environ 75% de terrains montagneux, on peut dire que le Japon est bien cabossé. Les forêts regorgent de secrets et de petits chemins dont il est quelquefois difficile de savoir où ils mènent. Heureusement, les traces de l’homme ne sont jamais bien loin.

À travers les « Sugi » (cryptomères) on peut lire parfois des mises en garde contre les ours. Pour éloigner ces derniers, on invite le voyageur pédestre à sonner une cloche installée sur le bord du sentier. L’ours est dangereux lorsqu’il est surpris. Le son cristallin d’une cloche lui indique au loin la présence des hommes, seuls êtres capables d’émettre ce genre de bruit.
Ours, forêt, Japon et je marche en me remémorant une chanson pour enfant nommée « Mori no kumasan », Monsieur l’ours de la forêt.
La mélodie m’accompagne à mesure que je m’enfonce dans les bois. Le froid se fait plus fort tandis que la solitude, agréable au début, se colore parfois d’inquiétudes à présent. Je commence à douter du chemin. Aurais-je manqué un sentier ?

Heureusement, j’aperçois des maisons qui me font signe à travers les arbres. Elles m’indiquent que je suis arrivé à destination en dehors des bois. Mais à ma grande surprise, je remarque que le monde des hommes ne se distingue pas autant que je le pensais. Les maisons de campagne au Japon, elles sont comme les forêts, faites de bois. Ce n’est pas pour me déplaire, moi qui ai toujours rêvé de dormir dans une cabane perchée sur un arbre.