Dompter la rue

Quand on fait de la photo je crois que le comportement le plus naturel est d’appuyer sur le déclencheur quand on voit quelque chose qui nous frappe. Ça doit être spontané, au moins lorsque l’on débute. À l’époque, je faisais surtout des paysages. Je voulais montrer les rues, les ambiances, le décor du Japon, pays dont je rêvais.  Tout ici me semblait si fascinant ! J’adorais observer ce monde passivement, sans le bousculer. Je ne voulais pas l’influencer.

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Lorsque j’ai commencé, je n’aurais pas pensé continuer à faire encore aujourd’hui autant de photo. C’est le fait de voyager au Japon qui m’a poussé à commencer. Aujourd’hui je vois ça comme un fil rouge de ma vie, d’autant plus que je vis au Japon et que d’une certaine façon, c’est comme être en voyage de manière permanente, à la différence près que je fais maintenant aussi partie de ce monde. Je n’ai plus de raison d’être passif. En tout cas j’évolue avec mes envies photographiques et explore à mon rythme, et sans prétention, cet univers si riche et complexe.

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Ces derniers temps, j’ai l’impression d’avoir fait un peu le tour quant à ma manière de procéder jusqu’à aujourd’hui. Il est temps d’explorer de nouveaux horizons. On pourrait tomber dans le piège de vouloir renouveler son matos pour changer d’air (ce dont j’ai envie au fond de moi, je ne vous le cache pas), mais au delà du matériel, j’ai des idées en tête. Seulement, il me faudra du temps pour amorcer concrètement tout ça. Je veux changer ma manière de faire, mon approche, aller plus loin, aller plus dans l’humain.

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À force de m’enfoncer dans les couches sociales les plus profondes de la société nippone, je suis de plus en plus sensible à la condition des hommes et des femmes que je croise. Je le dis souvent, le Japon est beaucoup plus complexe et inégal que ce que l’on en voit habituellement. J’aimerais un peu plus immortaliser ces personnes dans leur environnement. Ils sont la vie et font la vie.

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J’ai toujours eu un peu de mal avec une approche trop « anthropocentriste » dans l’art. Mettre l’homme au centre de tout, inondant le reste, ne m’a jamais attiré vraiment. Néanmoins, à moi cette fois-ci d’essayer de dompter un peu plus la rue pour élargir mon angle, aiguiser mon regard et améliorer ma technique photographique.
C’est drôle mais là où l’homme se trouve j’aime le noir et blanc en photo. J’ai l’impression que ça permet de se concentrer plus facilement sur les choses essentielles qui se dégagent d’un cliché.

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Mais attention, je reste dans la continuité et si quelque chose me frappe, je continuerais de shooter comme au bon vieux temps. Les hommes c’est bien, un soleil d’été aussi 🙂

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15 Comments
  • David
    1 septembre 2014

    Je trouve ça un peu bizarre quand tu dis avoir du mal avec une approche anthropocentriste dans l’art. L’art est par définition anthropocentriste, il n’y a pas d’art sans humain.

    Sinon, content que tu décides de te focaliser plus sur les gens. Par contre, je reste allergique au noir et blanc. Si ça passe encore sur des gros plans ou sur des photos comme les deux vieilles dames au-dessus, prendre un matsuri en noir et blanc, c’est « gâcher » à mes yeux. Mais c’est personnel, et je sais que nombreux sont ceux qui sont en désaccord avec moi.

    (autre « problème » : le watermark en couleur sur les photos noir et blanc, ça attire aussi un peu trop l’oeil, peut-être devrais-tu en faire un différent pour le noir et blanc – ou alors pas faire de noir et blanc 😉 )

    • Angelo Di Genova
      1 septembre 2014

      L’art est une création humaine mais il y a toutes sortes de sujets dans les oeuvres. Je parlais du sujet et non pas pas de l’art en tant que tel 🙂 Par exemple, la différence entre un tableau de paysage et ceux de la renaissance mettant en scène des hommes ou des anges d’apparence humaine.

      Je comprends ton argument concernant le noir et blanc. Je t’avoue ne pas trop y réfléchir non plus. Sur des matsuri, les couleurs sont importantes, c’est vrai, surtout quand on désire mettre en avant l’évènement. La photo en question n’est pas là pour « reporter » la situation mais bien pour mettre en valeur uniquement le comportement de cette jeune fille qui regarde dans le sens inverse de la marche des personnes autour. Mais, je saisi parfaitement ce que tu veux dire. Ne t’inquiètes, j’ai pas décidé de shooter systématiquement en noir et blanc ^^

      Alors, concernant le watermark, je me faisais exactement la même réflexion. Je vais essayer de faire un truc plus simple. Merci à toi !

      • David
        1 septembre 2014

        Oui, oui, pour l’art, je vois ce que tu veux dire. C’est le terme qui m’a fait tilté (même si le sujet est 100% naturel, l’art n’existe pas sans un artiste, ni surtout sans un spectateur) 🙂

        Pour le noir et blanc, oui, je comprends bien les raisons qui poussent parfois à l’utiliser (cf la photo du matsuri ci-dessus, le sujet n’est clairement pas le matsuri, mais la femme « à contre-courant »), mais c’est d’un point de vue esthétique que je bloque (mais bon, je sais que je suis dans une minorité parmi les amateurs de photographie).

        Le watermark passe beaucoup mieux ainsi (en fait, il est tellement discret, qu’il me donnerait presque envie de m’y mettre)

  • Ondori
    2 septembre 2014

    Moi c’est avec ton titre que je suis en désaccord. Pour avoir la chance de t’avoir auprès de moi dans la vie (oula cette phrase sonne mariage pour tous non?) je te vois évoluer. Affiner ta réflexion. Comme je l’ai fait aussi il y a peu… et continue de le faire. Vivre ici et peut être surtout s’y projeter donne nécessairement ces remises en questions. Pratiquer la photo aussi. Alors les deux ensembles…

    Tu reviendras à plus de paysages, un jour peut être. Ou tu t’interesseras à un autre aspect. Simplement parce que ce qui nous anime c’est la curiosité. Et que la curiosité ça se tari quand on a eu un certain nombre de réponses. Alors elle renaît sous forme de nouvelles questions.

    Donc non mon ami tu ne domptes pas la rue. Tu te domptes toi même. Tu domptes ta crainte d’entrer dans ces gens et non plus seulement passer entre eux sans les déranger comme on ne parle pas au gardien du musée et on va directement sur les toiles.
    Tu domptes ton appréhension de prendre parti. Est ce que j’oserai une psychanalyse de comptoir en disant que c’est ta vie à venir qui provoque aussi quelques remises en questions ?

    En tout cas fais tout le noir et blanc que tu veux. Moi j’ai fini par arrêter mais qui sait? Ça pourrait revenir aussi… car la vie à venir n’épargne personne niveau remise en questions…

    • Angelo Di Genova
      3 septembre 2014

      Voilà des commentaires comme je les aiment. Ils me permettent d’aborder une seconde lecture par rapport à l’article, et de voir les choses avec un autre regard. Merci à toi !
      Effectivement, d’une certaines manière, il s’agit de se réapprendre soi-même avant tout. Les remises en questions sont des choses essentielles dans la vie. Quelques fois c’est les évènements de la vie qui nous pousse à y venir, parfois c’est un acheminement spontané. Enfin, je crois ^^

      Je tiens à préciser que je n’ai pas dit que j’allais arrêter de faire des photos comme je l’ai toujours fait. Je vais simplement tenter d’en prendre de nouvelles avec une approche que je n’ai pas encore mis en pratique souvent.
      Ma vie à venir me force peut-être à repenser certaines choses. Je t’avoue que je n’y avais pas fait de rapprochement mais maintenant que tu le soulignes, c’est fort possible. Bien vu Sherlock ^^
      Le noir et blanc, pareil, je ne sais pas forcément si je vais l’utiliser régulièrement ou non. J’évite de systématiser mes créations. Je ne m’impose pas de ligne de conduite afin de garder une liberté totale, surtout sur ce blog.
      En tout cas, merci à toi pour ton commentaire et sache que j’ai hâte de revoir tes nouvelles photos un jour !

  • ShootJapan
    2 septembre 2014

    Han, pas mieux !

    Après maintenant 2 ans, j’ai envie de gratter la couche de béton et voir les individus. Peut être avec des séries de portraits.
    Y’a vraiment des « têtes » à shooter à Osaka. Les Osakajin, souvent aussi charismatiques que la ville !

    J’attend de voir avec impatience ce que tu vas faire :p

    • Angelo Di Genova
      3 septembre 2014

      Oui, c’est sûr qu’il y a de belles tronches ici, dans tous les sens du terme 🙂
      Il n’y aura pas forcément un changement hyper significatif sur le blog car les photos servent les articles et non l’inverse. Ça dépendra surtout du sujet.

  • Rodorufu
    5 septembre 2014

    Bonjour Angelo,

    Peut importe dans quelle direction la photographie va t’emmener, surtout continue !

    Continue à figer le temps, sur les gens, les paysages, la ville, la campagne, en noir, en blanc, en couleurs, peu importe, chacun de nous perçois la photographie avec sa propre sensibilité et son vécu.

    Un jour je me paierai un « vrai » appareil et et j’essaierai moi aussi d’attraper le fil du temps.

    J’adore tes articles, n’arrête pas d’écrire non plus 😉

    • Angelo Di Genova
      7 septembre 2014

      Bonjour à toi !
      Merci pour ton commentaire 🙂 Content de savoir que tu continues de suivre ce blog et d’apprécier mon travail. C’est important !
      Au plaisir de te revoir !

  • Jan Furansowa
    13 septembre 2014

    Bonjour Angelo,
    Superbe travail. Continue comme ça !
    Pour le N&B, contrairement à ce qu’on pense, les meilleures images sont souvent celles de scènes très colorées.

  • Valerie
    17 septembre 2014

    Achète du nouveau matériel ou pas – on n’est pas obligé d’acheter ce qu’il y a de plus cher sur le marché, et sincèrement, ça fait du bien de changer de matériel aussi. Essaie-toi au noir et blanc si tu en as envie – parfois, le noir et blanc traite bien mieux un sujet que la couleur. Photographie les gens si c’est ce que tu ressens – mais aussi tout ce que tu trouves beau, charmant, poétique, étrange… Photographie simplement ce que tu as envie de photographier.

    Horizons du Japon est un blog, considère-le donc comme sorte de journal de bord. Tu n’as pas à répondre à un lectorat comme les quotidiens en ligne ; c’est ton espace, et donc, tes aspirations. Si tu y trouves un lectorat pour apprécier ce que tu fais, alors, c’est un bonus. Les visites de points touristiques aussi, ça fait partie de notre vie, alors, tu n’as pas à ne pas les montrer parce que tu es en recherche d’autre chose ; et je pense que cela fait aussi plaisir à certains lecteurs. Bref, essaie, shoot, ce qui te fait plaisir sur le moment et sans contrainte.

    Un seul bémol ! J’aime beaucoup cette photo des vieilles dames sur les marches (d’un temple je suppose) mais le traitement entre deux eaux où l’on sent l’hésitation couleurs/noir et blanc, évite. Choisi l’un ou l’autre. Ce traitement en désaturation partielle montre qu’on ne sait pas quel choix faire, et du coup, une photo perd de sa force. Je pense qu’elle peut être aussi bien en couleur qu’en noir et blanc, mais à toi d’arrêter ton choix.

    Bon courage dans ton chemin photographique !

    • Valerie
      17 septembre 2014

      J’ai oublié de dire que le noir et blanc est une étape normale dans le chemin photographique.

      Après tout, nombre de grands maîtres sont issus du monde de la photographie noir et blanc : Robert Capa, Henri Cartier-Bresson, Diane Arbus, Robert Franck, Weegee…

      Des photographes contemporains s’en servent toujours, jusque dans la mode : Karl Lagerfeld, Steven Meisel, Peter Lindbergh…

      Et la photographie noir et blanc n’a pas fini de fasciner comme le prouve la consécration d’une inconnue de son époque, rendue célèbre par la découverte de dizaines de milliers de négatifs après sa mort : la très secrète Vivian Maier.

      Alors, certes, nous n’avons pas le talent de ces maîtres, mais sincèrement, si le noir et blanc te tente, fais-toi simplement plaisir.

    • Angelo Di Genova
      17 septembre 2014

      Merci de partager ta vision et tes remarques ici. C’est enrichissant 🙂
      Je compte bien continuer d’explorer les choses sans me poser trop de questions. À la base, je suis quelqu’un d’assez spontané.
      Merci de m’encourager à continuer d’avancer sur mon chemin photographique !

  • charlie&Philou
    27 février 2015

    il y a 35 ans de ça, à l’époque de l’argentique-roi, mon père a fait ses plus belles photos au Leica …en noir & blanc ! ainsi il rendait de façon extraordinaire le grain de peau du bébé que j’étais, les nuances de lumière sur le visage de ma mère.
    le n&b apporte une intemporalité à la scène shootée, la transforme en poème, rehausse ses volumes et en fait une sculpture … en 2 dimensions.
    A mes yeux il est donc idéal pou les portraits, comme celui de cet homme (joueur de Go ?)
    As-tu un « mode » n&b sur ton appareil ou bien les retravailles-tu après pour passer de la couleur aux nuances de gris ?

    sinon j’adore « je vis au Japon et d’une certaine façon, c’est comme être en voyage de manière permanente » !
    Profite !

    • Angelo Di Genova
      28 février 2015

      Merci pour ton commentaire !
      J’ai un mode noir et blanc mais en principe je ne l’utilise pas car j’alterne vraiment le style de photo quand je shoot. Mais c’est quelque chose qui me trotte en tête depuis un moment que d’aller shooter uniquement en noir et blanc pour faire un style précis de photo.
      C’est vrai que pour les portraits, le noir et blanc a quelque chose de fascinant que la couleur ne propose pas.